Hubert Reeves

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POINT DE VUE



Défendre la Charte de l'Environnement : une obligation à laquelle Hubert Reeves ne s'est pas soustrait. Voici le « point de vue » qu'il a transmis au Monde en tant qu'astrophysicien et président de la ligue ROC, texte publié dans l'édition du 27 février 2005 :




Indispensable principe de précaution

Il faut inscrire en lettres d'or l'article 5 de la future charte de l'environnement : « Lorsque la réalisation d'un dommage, bien qu'incertaine en l'état des connaissances scientifiques, pourrait affecter de manière grave et irréversible l'environnement, les autorités publiques veillent, par application du principe de précaution et dans leurs domaines d'attribution, à la mise en œuvre de procédures d'évaluation des risques et à l'adoption de mesures provisoires et proportionnées afin de parer à la réalisation du dommage. »

Nous nous sommes mobilisés pour défendre la charte de l'environnement lors de ses passages dans les deux Assemblées et nous nous étions réjouis des votes des parlementaires. Il reste qu'elle doit recevoir une consécration constitutionnelle afin que le principe de précaution prenne une valeur décisive.

La pertinence de ce principe est à souligner à nouveau puisque le grand jour est proche. C'est un principe d'action exceptionnel pour risques exceptionnels.

Rappelons que nous avons à faire face à des risques exceptionnels concernant la santé planétaire et la santé humaine, risques dont l'humanité pourrait pâtir de façon grave. À cet égard, le principe de précaution est un élément essentiel de la charte.

Il s'agit d'éviter des évolutions dangereuses non seulement pour la nature et l'environnement mais pour nous-mêmes, puisque tout ce que nous faisons a des répercussions sur nous. Attendre le stade des certitudes scientifiques pour se mettre à infléchir le cours des choses pourrait être suicidaire.

L'article 9 dit : « La recherche et l'innovation doivent apporter leur concours à la préservation et à la mise en valeur de l'environnement. » On a là un levier considérable pour le développement des connaissances et des techniques, un tremplin pour des carrières scientifiques, une source de postes de chercheurs à créer pour apporter ce concours.

Il est difficile d'imaginer que les députés et sénateurs qui ont voté le texte de la charte de l'environnement puissent aujourd'hui se dédire. Et qu'on ne dise pas « non » au motif que ce n'est pas suffisant. En disant « non », il n'y aura rien du tout. C'est pire. Faisons ce pas, la prochaine fois on en fera un autre.